Journal d’avril 2024

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Lundi 29 avril

Comme tout le monde, j’ai mes valeurs et mes idées politiques. Elles influencent ma manière de voir le monde et d’agir. 

Cependant, en tant qu’écrivain, mon engagement s’arrête là où commence ma pratique artistique. Je ne nie pas que toute littérature est politique : elle l’est, qu’on le veuille ou non. Mais, en fiction, je considère que ce qui importe par-dessus tout, c’est l’histoire. 

Chaque genre a ses codes, ses attentes et son imaginaire : je les accepte (avec plus ou moins de grâce). Même ceux de la romance, qu’on peut considérer comme un outil de propagande du patriarcat et de l’hétéronorme !

Mardi 30 avril

Ces dernières années, les réseaux sociaux se sont transformés en lieu de batailles rangées où l’on polémique sur le contenu des histoires mêmes, comme si elles étaient réelles. On juge que tel personnage est un « red flag », ou que la relation amoureuse n’est pas saine. On clame haut et fort que le roman n’aurait donc pas dû voir la lumière du jour. On conspue même l’auteurice comme s’iel avait commis un crime contre l’humanité. 

Les débats, à l’origine sains et nuancés, se sont abâtardis. On a assisté à l’émergence d’une police de la pureté dans certaines communautés. Alors qu’on s’était débarrassé, bon an mal an, de la censure d’État, voilà qu’on la voit réapparaitre sous d’autres formes, plus démocratiques certes, mais tout aussi dangereuses. Pire encore : voyant les foules enragées sur les RS, beaucoup d’auteurices, voulant bien faire, se censurent. 

N’oublions pas que beaucoup de ces écrivain·es-là font aussi partie de groupes minorisés. Plutôt que d’obtenir la liberté à laquelle iels avaient droit, iels se retrouvent à brider leur imaginaire et à le limiter à leur seule expérience.

Enough is enough.